Faut-il mener des projets pour agir?
Avant d’y répondre, je vous propose un détour par un article critique qui s’intéresse spécifiquement à la notion de PROJET, par le biais d’un cahier, publié par l’ancienne SCOP² le Pavé.
Le projet : késako?
Au début du XXe siècle, le développement de l'industrialisation a nécessité une meilleure organisation des activités pour atteindre des objectifs spécifiques : c’est l’époque où ont fleuri les méthodes de gestion et de planification de projets, et notamment celle d’un scientifique américain Henry Gantt, qui a développé un outil de planification graphique appelé le diagramme de Gantt.
—> la notion de projet est issue de l’idéologie libérale. Celle de méthodologie de projets est proche du taylorisme, elle vise un résultat - une gestion axée sur des résultats - et consiste à l’époque en une technique de contrôle et d’évaluation, dans une logique de réduction des coûts.
Derrière la notion de projet, il y a
une politique de suppression de tout service public par privatisation et transfert aux possédants.
C’est le marché!
La méthodologie de projets se met en œuvre par des logiques de marchandisation et une rationalisation des choix budgétaires.
L’exemple de l’ONU, 2001, quand une méthodologie sort de son champ de naissance, celui de la production industrielle
En 2001, sur pression des américains, l’ONU modifie l’article 1 de sa charte en changeant l’objectif de l’ONU de réduire les inégalités en la nouvelle formule réduire la pauvreté.
—> D’un objet politique, l’objectif de l’ONU devient technique. Il est désormais chiffrable et déconnecté des enjeux.
L’exemple de la FFMJC, au milieu des années 1980
La FFMJC - Fédération Française des Maisons de la Jeunesse et de la Culture - a vu ses subventions être modifiées. Jusqu’alors, elle fonctionnait grâce à des subventions de fonctionnement, qui constituaient une forme de délégation de service public sous contrôle de l’État : désormais, elle fonctionnera grâce à des subventions par projets, permettant un contrôle a priori et en établissant une grille d’évaluation de méthodologie de projet.
—> désormais, c’est à l’association de se payer sur ses activités, en devant les rentabiliser de manière marchande.
—> l’argent public servira à financer des actions de jeunes et non plus un fonctionnement associatif.
Ce changement s’inscrit dans une logique de rentabilité de l’action publique, où tout doit s’autofinancer, tout est marchandise. Il y a désormais un impératif de résultat qui s’impose : un résultat mesurable, chiffrable, évaluable.
—> cela contribue à précariser le secteur associatif, en privant les associations d’une capacité à penser sur le long terme. Elles deviennent dépendantes d’actions court-terme et de subventions par actions.
La méthodologie de projet a donc consisté à importer dans la société le fonctionnement de l’entreprise. C’est-à-dire à orienter toute activité humaine vers la production d’un résultat quantifiable.
Renverser la logique de projet
Derrière la logique de projet, il aurait la triple injonction : celle de POSITIVER, une injonction à la RÉUSSITE, enfin une injonction à la COHÉRENCE.
Une des manières de faire serait d’obtenir de petites victoires à sa portée : des victoires qui donnent de la force!
même si c’est de manière provisoire, nommer un ennemi mais un ennemi à notre portée - il est plus facile de refuser une évaluation que de renverser le capitalisme
Les finalités de l’éducation populaire
Renverser la vapeur
Considérer la jouissance gratuite et le repos
Reconnaître une sexualité aux enfants
Reconnaître le besoin et le désir d’être seul
Permettre la possibilité de s’opposer à l’autorité
Revendiquer la mise en lumière des contradictions plutôt que le consensus mou
Il n’est plus question de mettre en place une activité avec un dessein précis, mais de mettre en place un dispositif spatial permettant aux personnes / aux enfants de répondre à leurs besoins et à leurs désirs.
ENRICHIR LE MILIEU, cela permet d’aménager l’espace et de favoriser l’horizontalité.
ce qui compte n’est pas la consommation d’un milieu riche posé là, telle une manne gratuite, mais bien l’interaction entre le milieu et les personnes dans un aller-retour de confrontation / de construction qui permet l’émergence d’une pensée complexe, contradictoire… rugueuse?
Et le Pavé, alors, qu’est-ce que c’est?!
C’était une coopérative bretonne qui fonctionnait de manière horizontale, ça peut s’appeler de l’autogestion. Le Pavé visait à réintroduire du politique dans le débat public. Le collectif s’est auto-dissous en 2014.
Nous œuvrons dans le champ de l’éducation populaire, et sommes constitués en réseau avec trois autres coopératives d’éducation populaire et les gesticulants volontaires. Ce réseau se nomme La Grenaille.
Nos interventions ont l’ambition de libérer l’imaginaire politique et de redonner de l’espoir pour construire ensemble des alternatives.
Le socialisme du XXIe siècle est à inventer.
À nous de jouer, et on vous compte dedans.
² SCOP : il s’agit d’une entreprise avec un statut de société coopérative. Plus d’informations sur le site des SCOP https://www.les-scop.coop/les-scop.
Pour aller plus loin pour agir et développer des pratiques d’éducation populaire
http://lengrenage.blogspot.com/p/la-grenaille.html
https://collectif-lavolte.org/references-theoriques-et-bibliographiques/